Patrick Berger architecte, Paris

Le centre sportif Alfred Nakache, Paris

Nager sur rue

La piscine est reliée à la rue d’un seul trait.
Son volume parallélépipédique croise le volume parallélépipédique de la rue Dénoyez : dehors, on voit des lignes d’eau se diriger vers la chaussée ; dedans ; en nageant on se dirige vers les passants. La tête hors de l’eau est à un mètre au dessus du niveau du trottoir, si bien que les plans aquatiques et le sol urbain se confondent presque, la natation est en ville.

Milieu sec sur milieu humide

La piscine est une partie d’un complexe sportif ; des sports en salle l’accompagnent. L’ensemble est un projet de salles successives : la piscine est dessinée comme une salle d’eau, au dessus sont posées trois autres salles pour la danse, la musculation et le fitness ; puis au dessus de celles-ci, une dernière salle accueille les arts martiaux. Les milieux secs s’empilent sur le milieu aquatique et le protège thermiquement.
L’ensemble est agencé pour que l’on puisse passer d’un sport à un autre, des exercices aquatiques aux exercices au sol.

Relations visuels et physiques

La disposition des circulations créée des points de vue divers sur le quartier de tous cotés : sur le devant, latéralement et à l’arrière.
Toutes les salles ont en commun une propriété spatiale spécifique : Chaque salle s’ouvre pleinement sur un espace de circulation lui-même dégagé sur l’environnement. Cette mise en relation qui est celle de la piscine, du hall et de la rue est reconduite, au premier étage, entre les salles, la galerie latérale qui les distribue et la vue qu’elle déploie sur les parcelles mitoyennes ; la salle d’arts martiaux enfin à l’arrière, et tout en haut, prolonge son espace par une terrasse en plein ciel qui domine les cours arborées à l’intérieur de l’ilot.
Ces communications de pleine mesure entre salles, circulations et extérieur sont aussi celles d’une pleine aération naturelle.
Les corps en mouvement, la lumière, l’air et le paysage urbain sont assemblés physiquement par ce dispositif.

Préconception du chantier

La situation de la piscine est un quartier du bas Belleville qui rend difficile et contraignant toute opération de construction car ce secteur urbain est constitué de rues très étroites et d’immeubles à l’état souvent vétuste et dégradé.
Le projet architectural a donc mis en pensée le chantier dès les premières esquisses : De grandes dispositions du plan d’ensemble architectural ont été induites par cette anticipation sur la mise en œuvre.

Ainsi,
Les bassins de la piscine sont situés au centre de la parcelle à la plus grande distance possible des fondations des immeubles mitoyens, par mesure de protection ;
Le jardin est une reconversion préconçue de l’aire du chantier ;
Une structure métallique et des éléments préfabriqués pour l’enveloppe ont été choisis pour limiter la durée et la quantité des interventions sur le site.
La combinaison de ces décisions constructives avec les principes architecturaux ont composé le plan d’ensemble : Le terrain est divisé en « trois parcelles d‘usage », les vestiaires, les sports et le jardin. Les vestiaires et le jardin sont aux deux extrémités, les sports sont au milieu dans un volume qui regroupe la piscine et toutes les salles qui lui sont superposées. Seule exception dans cette division fonctionnelle, la pataugeoire pour les enfants dessinée comme un pavillon d’eau dans le jardin.
Les trois entités distinctes et parallèles : Vestiaires, Sport, Nature, confèrent une clarté dans la distinction des valeurs d’usage du complexe sportif.
Ces entités sont reliées par le hall et les circulations horizontales et verticales qui constituent l’élévation sur rue. Le hall principal prolonge intégralement le volume intérieur de la piscine ainsi que son sol et son plafond ; les dimensions et la matérialité de la piscine sont visibles depuis la rue.

Le matériau de l’extérieur est le matériau de l’intérieur

Le volume intérieur de la piscine est revêtu de fibre de verre. La résistance à l’humidité de ce matériau, une fois traité, compatible avec des perforations permettant de lui associer un isolant acoustique sont des propriétés qui répondaient en qualité de confort sonore et d’hygiène qui sont les deux partis pris physiques de l’architecture intérieure.
C’est également au regard de l’hygiène que les bassins sont en inox car cette facture limite considérablement le linéaire de joints.
La fibre de verre est le matériau d’expression du complexe sportif. Ici la matérialité des façades nait de la matérialité de l’intérieur de la piscine, c’est la matière du dedans qui génère celle du dehors : Les revêtements intérieur et extérieur sont ainsi des surfaces d’éléments en fibre de verre.
L’ensemble est fabriqué à partir de deux seuls types d’éléments issus chacun d’un seul moule. Leur assemblage s’effectue à chant ou debout selon les façades : debout pour la façade sur rue afin d’exprimer les flux d’aération naturelle qui ventilent les espaces intérieurs, à chant sur les autres façades présentant des surfaces murales.
La fibre de verre déjà présente dans l’univers des équipements sportifs s’inscrit ici dans l’architecture.
Elle a ici choisie une couleur qui devient celle de l’édifice : jaune.

Voir les crédits

Programme : Conception et réalisation d’un centre sportif, comprenant une piscine, des salles de sport et un jardin

Maître d’ouvrage : Mairie de Paris

Situation : 4 à 12, rue Denoyez, 75020 Paris

Architectes : Patrick Berger et Jacques Anziutti
Conception architecturale : Patrick Berger

assist. : J. Abinal ; B. Bastianelli

Date : Patrick Berger lauréat du concours national 2004, livraison mars 2009

Images : © agence Patrick Berger et Jacques Anziutti architectes

Croquis : © Patrick Berger

Maquette : © Thierry Martin

Photographies : © Duccio Malagamba

Textes : © Patrick Berger